Du temps présent au futur
- Domitille
- 23 avr. 2020
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 24 avr. 2020
Trois articles, de Mojola Alabi, Camila Pavon, Erika Undeland et Sylvia Ren
Mojola Alabi

Camila Pavon
le 16 avril 2020
[ le confinement ]
Chère Camila,
Ceci sera un petit message pour que tu liras dans un mois. Ou avant cela, c'est comme tu veux.
Maintenant, je suis toute seule à la maison (si je ne compte pas mon chien). Mes parents sont toujours en Bolivie et on ne sait pas quand ils rentreront. Je peux dire, avec certitude, que ces quatre semaines de confinement m’ont plongées dans des montagnes russes d'émotions. Certains jours, je me sens heureuse d'être indépendante, de suivre ma routine sans distractions, et de n’avoir personne avec qui me disputer. D’autres jours, je me sens complètement isolée du monde. Parfois, même le silence me distrait. Ce que j'ai appris récemment, c'est qu'il n'est pas obligatoire d'être productive ou heureuse ou de bonne humeur tout le temps. Pendant ces moments d’incertitude, il est normal d'être un peu inquiète, de se mettre en colère contre le monde, de ne rien faire pendant la journée. On a le droit d'être fatigué, physiquement et mentalement.
Cependant, ce confinement peut être utilisé aussi pour le faire le bien. Pour envoyer des petits messages aux gens qui travaillent tous les jours pour aider la situation qui nous touche à l’extérieur. Pour apprécier chaque moment où on est en vie, car il est évident que tout peut changer en un instant. Les quatre murs qui nous entourent ne sont pas une prison, mais servent de protection et d'opportunité. J’essaie, pour la plupart du temps, de trouver comment je pourrais profiter de ces moments de confinement pour apprendre, comprendre et réfléchir. On a le temps, donc il faut le faire.
L’autre jour, j’ai lu un tweet d’un professeur de comportement organisationnel, Gianpiero Petriglieri, qui m'a fait réfléchir profondément sur la façon dont les gens gèrent la distance et le manque de contact entre eux. Il parlait des réunions de travail organisées à l’aide d’applications comme Zoom, et la manière dont ces actions affectent le désir interne de n'être pas seul. Ce qu'il a dit m'a émue beaucoup parce que c'est presque exactement ce que je ressens en ce moment.
Je traduit sa pensée ci-dessous :
C’est le déni plausible de l’absence de l'un de l’autre. Nos esprits sont piégés dans l’idée d’être ensemble quand nos corps sentent que nous ne le sommes pas. La dissonance est épuisante. Il est plus facile d’être en présence d'un autre, ou en l’absence d'un autre qu’en présence constante de l’absence d'un autre. Nos corps gère tellement de contexte, tellement d’informations, au cours de rencontres, que les réunions vidéos sont comme un étrange type de bandeau sur les yeux. Nous sentons trop peu et ne pouvons pas imaginer assez. Cette privation unique exige beaucoup d’efforts conscients.

J'espère que ce message t'a aidé un peu. Merci de le lire.
Erika Undeland
Le confinement est difficile pour la plupart des gens. Le plus gros problème avec le confinement est qu'il est différent pour chaque personne. Par exemple, pour ceux qui vivent dans une famille heureuse et ont leur propre espace dans leurs appartements ou maisons, la quarantaine n'est pas aussi difficile que pour ceux qui vivent dans un espace surpeuplé avec des gens qu'ils n'aiment pas. À Passer autant de temps au même endroit, sans avoir la liberté d'être seul, peut être très difficile. Un autre problème concerne le statut social. Ceux qui sont plus riches sont plus susceptibles de pouvoir travailler à la maison, ce qui signifie qu'ils sont moins susceptibles de devenir chômeurs. Donc, ces personnes ont de l'argent pour continuer à se sentir en sécurité. Cela signifie également qu'ils ont quelque chose pour occuper leur cerveau pendant leur confinement.
En termes de rapprochement, je ne pense pas forcément que je me suis beaucoup plus rapproché des autres, autant que d'autres se sont rapprochés de moi. Comme j'ai beaucoup déménagé, j'ai l'habitude de rester en contact avec des gens éloignés. Pour cette raison, j'ai fait l’effort de parler très fréquemment à mes amis, en particulier à ceux qui sont un peu seuls. Beaucoup d’entre eux apprécient vraiment l'effort que j'ai fourni, car pour certains ils ont du mal à se connecter à SMS et au téléphone. Par conséquent, beaucoup de mes amis ont l'impression qu'ils peuvent compter sur moi pour rester en contact avec eux. Je pense qu'il est important d'appeler et de communiquer pour maintenir des liens.
Sylvia Ren
Peut-être à cause du fait que je suis anglophone, le mot « confinement » semble très sévère. Le mot apparenté en anglais est : être emprisonné sans son gré comme une punition ; de plus, les mots pour les mesures d’isolation nécessaires pour ce moment particulier qui sont utilisés par les Américains donnent l’impression d’être beaucoup plus légers : « restez chez soi », « abriter sur place », « plus en sécurité à la maison ». En comparaison, le mot « confinement », plus court et stérile, met plus de distance entre le monde que je connais et ce nouveau monde. La France était toujours étrangère pour moi, mais maintenant, avec l’état de confinement, elle semble être une toute autre planète.
Alors qu’est-ce que le confinement en France ? Cet état du pays est difficile à imaginer pour moi. J’ai quitté la France le premier jour du confinement ; je n’ai vu ni les magasins fermés ni les rues vides. Paris, comme je l’ai connu, était une ville animée. Comment serait-il d’y être aujourd’hui avec tout le monde enfermé chez soi ? Je ne peux pas dire que je voudrais y vivre maintenant, mais je me pose la question.
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