Se soutenir et se réconforter
- Domitille
- 29 avr. 2020
- 6 min de lecture
Articles de Andrew Mancini, Elinor Martinez, Hannele Hellerstedt et Caleb Eickmann
Andrew Mancini
La solidarité que l’on retrouve sur Instagram
Honnêtement, Dieu merci pour Internet. Bien qu’on soit tous confinés dans nos propres maisons, on a la chance de ne pas être complètement seuls. Pour beaucoup d’entre nous, c’est un gilet de sauvetage qui nous empêche de nous noyer dans nos troubles émotionnels. Au moins pour moi c’est le cas. Instagram, en particulier, est l’endroit où j’ai passé la plupart de mon temps. Il n’y a personne qui ne soit affecté par cette situation. Il s’agit d’un événement mondial et Instagram est un endroit parfait pour observer les gens se rassembler. Que ce soit avec une pétition pour renflouer USPS ou un mail de Bill Clinton, la solidarité trouve sa place sur la plateforme.
Une nouvelle vague de défis d’Instagram ont inondé les flux de personnes où les gens se taguent pour faire certaines choses. Je suis sûr que nous les avons tous vus. Ils ont été assez stupides et ennuyeux, je peux l’admettre. Sans oublier que je n’ai jamais été nommé par aucun de mes amis pour en faire un. Même si je ne l’ai pas fait ça fait toujours mal d’être laissé de côté. De toute façon, la raison pour laquelle je les élève, c’est parce que cela révèle des gens qui se connectent et se réunissent sur de grandes distances pour participer à une activité partagée. C’est un acte de solidarité insensé qui n’a pas nécessairement de retombées bénéfiques sur la société, mais c’est un acte de rassemblement, néanmoins, d’un ennui partagé.
Les célébrités ont même trouvé de nouvelles façons de rassembler leurs abonnés et de créer des expériences communes grâce à l’utilisation de flux en direct. Lizzo a commencé à diriger des méditations en direct pour donner aux gens la chance de se recentrer en cette période d’incertitude. En utilisant sa flûte pour émettre des sons hypnotiques apaisants, Lizzo crée un espace virtuel de sérénité, ouvrant de nouvelles voies pour que les gens se connectent. Cette médiation de masse nous permet de descendre tous à la même fréquence et vibration, nous connectant d’une manière que nous n’avons jamais connue auparavant.
Avec l’annulation de tous les événements en direct, les artistes ont commencé à organiser des concerts en direct, avec Erykah Badu en tête de ce front. Elle a commencé une série de concerts en flux direct qu’elle appelle le « Apocalypse Series » et pour chacun, elle invite des milliers de personnes dans sa chambre pour une expérience intime. Elle nous permet même de guider la direction dans laquelle se déroule le concert soit en choisissant la chanson ou le genre de musique qu’elle joue. Les gens du monde entier peuvent se connecter et apporter leur contribution, faisant du concert quelque chose une production collective, une œuvre d’art participative.
On est tous pris au piège à la maison, mais cela ne signifie pas qu’on doit être seuls. Avec des plateformes comme Instagram, on a de nouvelles façons d’être solidaire. Il est réconfortant de voir les gens s’unir et collaborer de nouvelles façons imprévues, car les médias sociaux sont l’un des seuls moyens de communiquer dans un monde où règne la distance sociale. On ne peut pas s’unir en personne alors pourquoi ne pas s’unir virtuellement ?
Elinor Martinez
Dans ce temps d’incertitude, la solidarité est plus importante que jamais. Chaque personne doit penser aux autres, et il faut qu’on travaille ensemble pour se protéger contre le virus. Mais il peut être difficile de savoir quoi faire pour être solidaire, dans un temps où il faut rester solitaire et isolée. Donc, j’aimerais donner quelques exemples de comment être solidaire d’une une manière qui peut vraiment aider les personnes dans le besoin.
• La plus importante : penser aux personnes âgées, aux personnes malades et sous traitement. Restez chez soi et réduire les sorties le plus possible.
• Coudre et distribuer des masques médicaux : même si les masques « DIY » ne sont pas parfaits, ils valent certainement mieux que rien, parce qu’ils peuvent aider les autres à éviter de se toucher le visage.
• Donner l’argent : Il est facile de trouver des organisations de bienfaisance qui sont focalisées sur le coronavirus, mais n’oubliez pas aussi les autres causes, comme l’environnement, les animaux, ou les banques alimentaires.
• Pour les étudiants : faire du tutorat ! Beaucoup d’écoles sont fermées ou en ligne, et pour les élèves qui ont des difficultés, cela pose un grand problème. Si vous pouvez, contactez les écoles dans votre ville et vous proposer comme tuteur, gratuitement ou à un prix réduit.
Ces exemples ne sont que le début de ce que l’on peut faire. L’idée clé, c’est que la solidarité c’est l’action.
Hannele Hellerstedt
La Solidarité en confinement : Soutenir sa communauté et rester connecté avec ses proches
Faire les courses pour les personnes âgées— Ma grand-mère a beaucoup de voisins qui ont plus de soixante ans, donc c’est parfois difficile pour eux de faire leurs courses comme d’habitude. Cependant, on a commencé une liste articles qui sont difficiles à trouver au supermarché et quand quelqu’un les trouve, il en achète exemplaires pour les distribuer ensuite aux autres voisins.
Acheter dans des magasins indépendants— Le fils de notre boulanger, Arthur, a ouvert un café la semaine avant le début de confinement, donc le dimanche, on lui commande des plats à emporter.
Rester connecté avec ses amis— À La Maison française (avec un groupe d’étudiants de Brown) on a commencé « la question de la semaine » pour animer le groupe chat et faire le point avec tout le monde. On a aussi formé un système de binôme pour renforcer la relation entre les nouveaux et les anciens membres du groupe. Avec mes amis, on utilise NetflixParty et FaceTime pour continuer de se voir tout le temps.
Rester connecté avec la France— Je parle avec les membres de mon groupe d’archi tous les jours et on travaille ensemble sur notre projet du semestre. On parle aussi de nos vies en confinement et de ce qu’on fait pour se distraire. Je regarde souvent les émissions de 3é scène et de l’Opéra national de Paris ainsi qu’une série française qui s’appelle « Un Village français » sur AmazonPrime.
Rester connecté avec sa famille— Mes grands-parents sont à Bruxelles, mes cousins sont à Sarajevo, et mon parrain et ma marraine sont à Asheville, donc on utilise notre groupe WhatsApp pour parler avec tout le monde et on partage des vidéos pour se remonter le moral.
Caleb Eickmann
Le coronavirus représente une menace mondiale, et il exige une réponse mondiale avant qu’une vie quasi normale ne puisse reprendre. Si une ville arrive à l’éliminer, le péril perdura jusqu’à ce que les régions dans les environs atteignent le même but. De même, si un pays réussit à limiter la propagation du virus, on devra tout de même s’attendre à certaines perturbations quotidiennes jusqu’à ce que la majorité du pays puisse l’éradiquer totalement. L’origine du virus en Chine reflète également les liens fondamentaux entre les épidémies qui se répandent partout dans le monde. L’émergence d’une nouvelle maladie dans une partie d’un pays en Asie peut provoquer presque cent mille morts en Amérique du Nord. L’échelle de l’activité humaine est maintenant tellement mondialisée que ce nouveau type de crise planétaire devient bien plus probable.
Ces nouveaux défis exigent de notre part une perspective inédite par rapport à la solidarité. Les notions traditionnelles qui nous unissent à la famille, au village ou à la tribu qui parlent la même langue ne suffisent plus. Ces défis exigent une solidarité avec le reste de la planète, une volonté de contribuer aux causes internationales même si les bienfaits locaux sont diffus pour gérer ces problèmes.
Pour le moment, les pays rivalisent les uns avec les autres pour obtenir des ressources médicales nécessaires pour traiter le Covid-19. Cette situation favorise apparemment les sociétés plus riches, et, tandis que la prévalence de la maladie augmente rapidement dans des pays en voie de développement avec moins de ressources, la menace croît. Si des épidémies y perdurent, malgré tous les efforts d’un pays pour limiter le virus à l’intérieur de ses frontières, le risque de transmission internationale restera fort, et l’économie mondiale sera gravement perturbée. Résoudre les problèmes que le coronavirus pose demande forcément des efforts conjugués pour le traiter partout.
Ce défi rappelle fortement la crise du changement climatique qui menace également la totalité de la planète. Il est impossible pour une petite partie de la population humaine de gérer la situation uniquement d’une manière locale. Le réchauffement climatique et l’élévation du niveau de la mer toucheront en effet tous les pays et toutes les régions de la planète, et les émissions de gaz à effet de serre de certains pays peuvent accentuer ces problèmes pour le reste du monde. Comme pour le coronavirus, la crise climatique est une crise mondiale qui exige une solidarité mondiale.
Cette sorte de défi évoque alors une nouvelle conceptualisation de sa relation avec ses voisins humains. Une considération de la réalité immédiate et individuelle ne suffit pas dans ce cas. Les liens entre tous les individus, et les conséquences écologiques, économiques et épidémiologiques de leurs actions, méritent plus d’attention. Il s’agit d’un réseau humain à échelle planétaire. Dans son article au sujet de la relation entre les réseaux sociaux et la solidarité, Alain Kiyindou propose que les réseaux ne soient pas « un donné naturel », peut-être sont-ils une réalité fondamentale de nos vies.
L’art de Tomás Saraceno déploie le symbole de la toile d’araignée pour représenter l’importance des liens infinis qui constituent le monde. Dans sa série, Hybrid Webs, il souligne que cette notion d’un réseau est très semblable à l’image visuelle de l’organisation des galaxies dans l’univers que les astronomes ont développée. L’univers consiste en des millions de liens. Il nous faut considérer ces relations qui deviennent encore plus importantes pour nos systèmes mondialisés. Il s’agit de la solidarité à échelle humaine.
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